Votre attention s'il vous plaît, vous allez assister, une fois n'est pas coutume, à une entreprise de démystification, tant pis, y a que la vérité qui compte...
Commençons par un flash-back. Août 2005, jour de mon anniversaire (oui, 82 ans, c'est bien). Confortablement installés sur les larges fauteuils d'Air France...Non reprenons. Fort à l'étroit sur de minuscules sièges même pas rembourrés (mais on n'avait pourtant pas demandé des places enfants), ex-monamour (les genoux coincés sous le menton, car il est grand pour de vrai) et moi-même nous envolons vers le département d'outre-mer où vit sa famille. À côté de moi un homme entre en prière, aggripé aux accoudoirs car, souvenez-vous, c'était l'année où les crashes d'avion devenaient routiniers et par conséquent les gens avaient trop la trouille et l'ambiance était électrique...
À mi-chemin ou à peu près, de retour des commodités (oui c'est comme ça qu'on dit en langage châtié), j'exprime à ex-monamour ma perplexité face à un phénomène physiologique tout à fait inédit et en texte intégral, à savoir qu'une certaine partie de mon corps, située plutôt entre les jambes, du côté gauche pour être exacte, se met à gonfler et c'est quand même bizarre n'est-ce pas ?
Un peu plus tard, toujours dans l'avion, une nouvelle inspection me permet d'affirmer que oui, c'est sûr, ce n'est pas une illusion d'optique, ça gonfle. Ex-monamour propose de lancer un appel au cas où il y aurait un médecin dans l'appareil. Je refuse ce scénario même pas digne d'un film catastrophe...
Arrivée à destination je me précipite à la permanence médicale de l'aéroport...où je tombe sur un vieux monsieur piquant du nez sur son bureau. Euh bonjour, excusez-moi de vous réveiller, pourriez-vous m'examiner s'il vous plaît ? Ce qui tient lieu de cabinet est poussiéreux, j'hésite un peu à m'allonger, mais bon, à la guerre comme à la guerre. Le vieux monsieur, armé d'une lampe frontale examine, longtemps, longtemps...oui bon ça va aller non ? et s'exclame : ah ben dis donc, j'ai jamais vu ça. Merci de me rassurer, c'est tout à fait ce qu'il me fallait. Alors on fait quoi maintenant hein, gros malin ? Je lui demande de m'indiquer un gynécologue. Ah ben non, pensez-vous, il en connaît pas. Bon. Ben alors vous pourriez peut-être me prescrire des anti-inflammatoires non ? moi j'dis ça, j'suis pas médecin, mais il me semble que vu que ça gonfle...Vous voulez peut-être que je vous tienne la main pour écrire ? Non ? ça ira ? Pendant qu'il rédige l'ordonnance, il me demande où je vais passer mes vacances. Je lui dis que je suis hébergée chez monsieur XXX, que je suis l'amie de son petit-fils. Et là il s'illumine, le vieillard revient à la vie : ah monsieur XXX, mais c'est un ami, un grand ami ! etc etc...Je me dis qu'il va peut-être pas me faire payer du coup, par amitié, et puis aussi, faut bien dire ce qui est, parce qu'il a pas vraiment bossé papy. Mais non, ça fait 23 euros. En me serrant la main, il ne me souhaite pas un bon rétablissement, non, surtout pas, il me demande de passer le bonjour à monsieur XXX. Je suis à peine énervée, presque pas. Je passe à la pharmacie et me rend compte qu'il m'a prescrit des suppositoires. Toujours zen. Les vacances commencent, nous sommes sous les tropiques, la vie est belle.
Un peu plus tard nous savourons un ti punch dans le jardin. C'est pour moi le premier contact avec la famille d'ex-monamour : dites-moi, vous auriez l'adresse d'un gynécologue ? La grande classe.
Je passe une horrible nuit car, outre le décalage horaire, j'ai l'impression (et ce n'est pas qu'une impression) que ça triple de volume. Ex-monamour calme mes angoisses d'un rassurant : de toutes façons on ne peut rien faire avant demain, alors ça sert à rien de s'inquiéter. Bon ben bonne nuit alors. Monamour.
Le lendemain à la première heure nous épluchons l'annuaire. J'obtiens un rendez-vous pour 13 heures. Ok. Ça nous laisse le temps d'aller nous baigner. L'eau est chaude, c'est un vrai bonheur, sous le soleil nos peaux brunissent en deux deux, mais j'éclate en sanglots parce que...c'est quoi ce truc qui déforme mon corps ?
Chez le gynéco. Assise en face d'elle je lui explique ce qui m'arrive. Ah mais ça doit être une bartholinite. Dieu soit loué, j'ai une maladie homologuée. Vous pouvez pas savoir le soulagement...juste parce qu'un diagnostic est enfin posé, juste parce qu'il y a un mot pour expliquer ce que j'ai. On passe à l'examen. Et là, ça rigole moins. Ouh là là, mais c'est énorme (je ne vous le fais pas dire). Normalement ça se traite aux antibiotiques, mais là, va falloir opérer. Quoi ? Could you repeat, please, before I cry...
Elle m'envoie chez un chirurgien. Je grille toute la salle d'attente, comme une princesse. Oui je peux vous opérer, mais pas avant deux jours, je n'ai le bloc opératoire que jeudi. C'est une blague ? Alors, me dit-il, vous avez le choix. Soit vous attendez deux jours, soit vous allez aux urgences. Non mais tu m'as bien regardée ? Tu crois vraiment que je vais patienter 48 heures sans devenir folle ?
Alors quoi ? Ben oui, forcément, les urgences. Surpeuplées les urgences, comme de bien entendu. Une petite fille s'est coincée le doigt dans une porte. Elle ne saigne ni ne pleure. Eh la pharmacie ça aurait peut-être suffit non ? Mais non je suis pas énervée, pas du tout, c'est mon état normal. J'explique à l'infirmière à l'accueil que je dois voir un gynéco. Ah non mademoiselle, vous passez d'abord avec un généraliste et ensuite il vous oriente vers un spécialiste si besoin est. Par contre on peut pas vous dire dans combien de temps...Non mais tu te fous de ma gueule toi, je sais ce que j'ai, c'est une bartholinite grave. Ah d'accord, répond-elle naïve, vous saignez c'est ça ? Non je saigne pas, pauvre crétine, j'ai besoin d'un intervention chirurgicale urgente, d'où ma présence aux urgences, tu saisis mamzlle Neuneu ? ah dans ce cas, mais de façon tout à fait exceptionnelle, je vais vous envoyer chez un gynécologue. Eh ben voilà, tes deux neurones ont fini par connecter, tu vois quand tu veux...
Gynéco bis. Mais c'est énorme ! (non, sans blague ?) Mais ça vous fait pas mal ? Ben non. Oui, j'ai oublié de vous dire, c'est totalement indolore. Étrange, voyez-vous, car selon les médecins, ça fait hurler de douleur ce truc. Ben chez moi non, je suis trop une résistante.
Entretien avec l'anesthésiste : c'est la première fois que ça vous arrive ? Euh...comment ça ? Sous-entendriez-vous que c'est le genre de chose qui peut arriver plusieurs fois à une même personne dans une même vie ? Et vous croyez à la justice vous ?
Bref, hospitalisation, opération, réanimation. Et là au réveil, au secours, j'ai mal. Ils m'ont ratée ou quoi ? Non, c'est normal, me dit-on, on va vous donner un peu de morphine. Sur une échelle de 1 à 10, vous avez mal combien ? Euh, disons 5...Injection. Petit soulagement. Euh en fait je m'ai trompée, je voulais dire 8. Re-injection. Waow, c'est trop puissant la morphine, je pourrais en avoir pour le dessert aussi ?
(Fin du premier épisode. Prochainement la suite, avec des blouses blanches, du suspense plein de rebondissements et Ada au top de la santé...)
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