Pff...j'te jure, y a des gens fatigants, je t'en donne trois en pâture.
Le premier.
Mon téléphone vibre. Un numéro non répertorié s'affiche...Même pas peur.
Oui ?
Bonjour Ada, ça va ?
Oui, c'est qui ?
C'est Canada Dry.
Oh Canada Dry ? Mais tu n'es pas aux États-Unis ?
Ça y est, je suis rentré.
Tu sais, j'ai rencontré ton ami, le mystérieux inconnu...
Ah bon ? Et vous êtes ensemble alors ? (j'aime ces déductions hâtives et sans fondement)
Non tu plaisantes...Il m'a un peu harcelée au téléphone. Franchement t'aurais pu éviter de lui donner mon numéro.
Mais je lui ai jamais donné ton numéro ! Pourquoi j'aurais fait ça ?
Je sais pas moi...c'est ce qu'il m'a dit. Il m'a dit aussi que tu t'installais en Californie.
N'importe quoi ! J'y étais pour les vacances. J'ai repris les cours là.
Bon, c'est vos affaires après tout, tu le connais mieux que moi, c'est ton ami.
C'est pas du tout un ami, c'est le frère d'un cousin (cousin au sens élargi africain, s'entend).
Bon bon. Ça n'explique pas comment il a eu mon numéro.
Il a dû le piquer dans mon portable (ben voyons, fous-toi de ma gueule). On peut boire un verre dans la semaine ? tu m'appelles ?
Ouais, on verra, pourquoi pas ?
Et ce soir tu fais quoi ?
Pas grand chose de prévu pour l'instant.
Tu m'appelles quand tu sors du taff ? je serai chez moi, y a un petit bar en bas, on peut s'y retrouver ?
Ouais peut-être.
Mais un apéro entre amis à la Butte aux cailles s'organise. Y a des priorités dans la vie...Et si Canada Dry est en quête de partenaire sexuel, faut pas qu'il compte sur moi.
Mon pote est dans un sale état. Il est amoureux et c'est compliqué (rien de très original quoi). On essaye de lui faire comprendre qu'il faut qu'il se lance. La fille arrête pas de lui jeter des regards de braise, elle lui envoie des SMS, elle rit même à ses blagues à deux balles (un signe qui ne trompe pas). Lui il a la trouille, il veut pas gâcher, il veut même pas en parler. Mais nous, tu sais comme on est, des bons amis merde...Faut dire aussi qu'il se remet très lentement (comptez 18 à 24 mois) d'un gros chagrin...
Il me ramène en scooter dans mon quartier, j'achète à manger, on se pose en terrasse du nouveau bar. Il a beaucoup trop bu et quand on lève le camp je lui dis : oh toi je sens que je vais te loger, je peux pas te laisser rouler dans ces conditions. Mais tu vas pas dormir chez le charmant ? (je traduis hein, l'élocution était bien plus difficile). Eh oh, pas tous les jours non plus. Là je rentre chez moi et toi tu fais pareil.
On se couche, il tente un câlin, je rectifie, il me parle de câlin d'amitié, oui mais non, je reste gentille, je mets ça sur le compte des ses abus, allez tu dors.
La deuxième.
Ce matin, réveil tôt (8h). Oui parce que dernièrement au taff, je me suis fait un peu griller : lors d'une réunion de service à laquelle je n'assistais pas (comme quoi les absents, on leur trouve toujours des torts), quelqu'une a annoncé publiquement, je veux dire tu peux pas faire beaucoup plus public qu'une réunion de service, niveau confidentialité c'est nickel : de toutes façons Ada elle arrive tellemnt tard qu'on sait jamais si elle va venir...Les copines m'ont prévenue que ça risquait d'être bientôt ma fête, alors bon, je fais des efforts jusqu'à ce qu'ils oublient, disons pendant deux-trois jours, ça devrait suffire.
En plus qu'est-ce que ça peut bien faire, mon heure d'arrivée, ça m'empêche de taffer peut-être ? Ce que j'aime beaucoup, c'est que personne (personne hiérarchiquement habilité je veux dire) personne ne m'en touche ne serait-ce qu'un mot. Non, on préfère les chemins détournés, surtout pas de contact direct. N'essayons pas de discuter.
Le troisième.
Donc ce matin j'assure. Je prépare du thé, j'en propose à mon pote. Réponse : je sais pas trop. Ben décide-toi, je te l'amèen au lit là, c'est sympa non ? Bon d'accord. Il ne dit surtout pas merci, pas la peine. Que fait-il à la place ? Il râle. Ouais parce que lui il est au chômage en ce moment, alors c'est quoi cette idée farfelue de faire sonner un réveil ? En plus j'écoute les infos et ça le soule. Je lui dis que désolée mais je travaille moi môssieur, toutes mes excuses vraiment...alors mon grand t'es gentil, tu vas cuver ♫ [t]on alcool et [t]a haine ♫ en silence ok ? Sur un ton calme mais me cherche pas non plus hein, je sais que toutes les circonstances atténuantes du monde sont réunies, mais bon si tu permets j'ai une vie aussi. Et puis c'est pas comme si ça m'était facile et naturel de me réveiller à cette heure, je lutte là et je peux aussi être de mauvais poil si je veux d'abord.
Sur le chemin coup de fil du charmant charmeur chilien qui, lui, rentre d'une longue nuit de taff. Subitement mon monde s'emplit de douce chaleur...
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